GERMINATION

Pour que la solidification puisse se produire, il doit exister dans le liquide des germes de solide ; la solidification résulte de la croissance de ces germes solides aux dépens du liquide.

L’étape de germination du solide au sein du liquide précède la solidification proprement dite et détermine en grande partie la structure et les propriétés du solide.


1. Germination homogène

Tout naturellement, la plupart des transformations se produisent à partir de germes de la nouvelle phase dans l’ancienne. C’est le cas de la solidification qui se propage par croissance des germes de solide aux dépens du liquide. Le mécanisme est du même type pour les réactions à l’état solide.

Supposons un germe sphérique de phase B apparaissant dans une phase A, lors de la réaction A → B. Sa formation entraîne une variation d’enthalpie libre :

  

Si la température T est inférieure à la température d’équilibre Te, GB<GA et ΔGv<0. La diminution d’enthalpie libre du système est proportionnelle au volume du germe soit :


avec r, le rayon du germe.

Cependant, dans le bilan énergétique global, il faut tenir compte de l’énergie de la surface séparant le germe de la phase mère. Si γAB est l’énergie surfacique de cette interface, la présence du germe augmente l’enthalpie libre du système de :

La variation totale d’enthalpie libre du système s’écrit donc :


L’étude de cette fonction montre que ΔG passe par un maximum pour une valeur rc du rayon telle que :

La figure 1 montre la courbe correspondante. Elle indique qu’un germe n’est stable que si son rayon est supérieur à  rc. Par conséquent, un germe de rayon supérieur à  rc aura tendance à croître ; inversement, si son rayon est inférieur à rc, il tendra à se redissoudre.

Pour atteindre la taille critique, un germe doit donc franchir la barrière de potentiel ΔGc. On montre que :

avec Te, la température d’équilibre de la transformation, T, la température réelle de la transformation et L, la chaleur latente de transformation.

La vitesse de germination est proportionnelle à exp(–ΔGc/RT) ; on constate qu’elle est nulle pour  T = Te à la température d’équilibre et qu’elle augmente très rapidement si l’écart de température TeT augmente.

Physiquement, cela signifie que sous l’effet de l’agitation thermique, les atomes peuvent se déplacer. Il peut alors se former des amas créant localement des germes de la phase B transformée. Ceux qui auront un diamètre supérieur à  rc seront seuls stables, les autres disparaîtront. On comprend donc que plus le volume critique des germes est faible, plus nombreux seront les amas de taille suffisante. On vérifie bien en effet que le rayon critique  rc diminue si l’écart de température TeT augmente et cela selon la loi hyperbolique :


2. Germination hétérogène

Les remarques ci-dessus concernent le cas où les germes se forment naturellement au sein de la phase mère ; c’est ce que l’on appelle la germination homogène. Dans certaines conditions les germes peuvent apparaître sur des particularités de la structure, donnant lieu à un mécanisme de germination dite  hétérogène. S’il s’agit d’un plan, le germe peut être assimilé à une calotte sphérique (figure 2) ; l’angle de raccordement dépend des énergies de surface entre le substrat et les deux phases A et B. En particulier, si l’énergie de surface entre le germe et le substrat est faible, l’angle α est petit. Dans ce cas, pour un amas de même volume, la germination hétérogène entraîne un rayon plus grand, donc une plus grande stabilité. Ces remarques expliquent que lorsqu’il existe des germes hétérogènes d’énergie de surface favorable, ce mécanisme de germination hétérogène est plus rapide et remplace la germination homogène.


Les imperfections du réseau, joints de grains, dislocations, précipités, inclusions ou autres peuvent servir de germes hétérogènes ; cela explique que dans de nombreux cas, les transformations à l’état solide commencent aux joints de grains. C’est le cas, par exemple, de la précipitation des carbures de type Cr23C6 dans les aciers inoxydables austénitiques, expliquant le phénomène de corrosion intergranulaire.